Abondance de lumière

‘Avvenire’ quotidien italien, a publié le 23 février dernier un article de mgr Echevarria, prélat de l’Opus Dei qui parle de la vocation du chrétien à l’apostolat. Voici la traduction de ce texte.

Voici la version française de l’article de mgr Xavier Echevarria, prélat de l’Opus Dei, publié dans le quotidien italien Avvenire.

‘Nous parvenons à être pleinement humains quand nous sommes plus qu’humains, quand nous permettons à Dieu de nous conduire au-delà de nous-mêmes pour que nous parvenions à notre être le plus vrai.

Là se trouve la source de l’action évangélisatrice.

C’est l’Amour qui est la clé de toute attitude authentiquement chrétienne

En effet, dès lors que l’on a accueilli l’amour qui rend son sens à la vie, comment pourrait-on contenir le désir de le communiquer à d’autres ?’

C’est avec ces mots-là que, dans Evangelii gaudium (n.8), le pape François évoque notre divinisation, cette élévation qui nous est accordée comme un don de Dieu. Dans le Christ, nous découvrons ce qu’est la personne humaine et la grandeur de sa vocation (Cf. Gaudium et spes, 22). François nous invite à ‘sortir de notre confort personnel et à avoir le courage de rejoindre toutes les périphéries ayant besoin de la lumière de l’Évangile’ (EG 20).

C’est l’Amour qui est la clé de toute attitude authentiquement chrétienne.

La ‘sortie’ à laquelle nous invite le pape n’est que ce que l’Église a traditionnellement appelé ‘apostolat’, ‘évangélisation’ : il s’agit d’un travail caractérisé, entre autres, par un respect absolu de la liberté, et qui n’a rien à voir avec le sens négatif que le terme ‘prosélytisme a pris surtout au 20ème siècle

Le pape en parle au n. 14 quand il affirme que ‘l’Église ne grandit pas par prosélytisme mais « par attraction »’.

Dans l’enseignement du Christ, on trouve le rejet évident de toute attitude ne respectant pas la liberté des autres et ignorant la dignité de la personne. Dieu veut être aimé en vérité et cela demande un choix libre. Toute vocation est une histoire d’amour et la rencontre de deux libertés : l’appel de Dieu et la réponse de l’homme.

L’apostolat, le zèle saint pour les âmes, qui est le témoignage de la lumière, comme le dit saint Jean (1,7)

C’est l’Amour qui est la clé de toute attitude authentiquement chrétienne. Le pape François emploie des termes et fait des gestes évangéliques qui le manifestent : ‘j’invite’ (EG 3, 18, 33, 108), ‘j’insiste’ (EG 3); il parle du ‘cœur débordant’ (EG 5) et nous encourage nous aussi à entrer dans ‘ce fleuve de joie’ (EG 5) qu’est la communauté chrétienne.

« Entrer ». Jésus-Christ a durement tancé les scribes et les pharisiens : ‘Vous n’entrez pas et vous ne laissez pas entrer ceux qui veulent entrer’ (Mt 23,13). Laisser entrer, permettre que l’on entre, inviter à entrer : la force qui attire, disait saint Josémaria, c’est ‘l’abondance de lumière’, la sympathie humaine, la prière, le sacrifice personnel, la présence du Christ chez le chrétien : ‘Aimer vraiment c’est sortir de soi pour se donner’ (Quand le Christ passe, 43). Voilà le sens de l’apostolat chrétien, le sens originel du terme ‘prosélytisme’, issu de l’hébreu, tel qu’il a été traditionnellement compris dans l’Église.

L’apostolat de personne à personne demande que l’on consacre du temps au prochain et qu’on ne compte que sur la force de la prière, de la patience charitable, de la compréhension, de l’amitié, de l’amour de la liberté. Le ‘suis-moi’ du Christ, loin de forcer qui que ce soit, respecte sa liberté. Le dialogue avec le jeune riche le montre hélas bien tristement.

Et aujourd’hui ? François souligne que ‘quand nous avons davantage besoin d’un dynamisme missionnaire qui apporte sel et lumière au monde, beaucoup de laïcs craignent que quelqu’un les invite à réaliser une tâche apostolique et cherchent à fuir tout engagement qui pourrait leur ôter leur temps libre’ (EG 81).

L’apostolat, le zèle saint pour les âmes, qui est le témoignage de la lumière, comme le dit saint Jean. (1,7), tient à l’abondance de lumière, sans la moindre ombre d’une imposition, avec une délicatesse extrême car Dieu, qui ne veut que l’amour, agit avec mansuétude : avec force et bénignité (cf. Sg, 1). Dans son message pour la XXème Journée mondiale de prière pour les vocations (2 février 1983), Jean-Paul II affirmait: ‘ Il ne faudrait pas qu’il y ait la moindre réticence à proposer directement l’appel du Seigneur à une personne jeune ou moins jeune. C’est un acte d’estime et de confiance. Il peut être un moment de lumière et de grâce’. C’est avec la lumière du Christ dont chaque chrétien rayonne que l’on vainc une timidité éventuelle susceptible de dénoncer un manque de foi et d’humilité.

Aux antipodes d’un prosélytisme mal compris qui ne respecte pas la personne, il y a un apostolat attirant, la propostion transparente et respectueuse d’un dévouement généreux, celui dont parle le pape, qui tient à un témoignage pleinement conscient de la liberté et de la dignité de la personne et qui fait que le cœur du chrétien participe de l’amour divin et humain de Jésus. Un cœur qui ne peut pas contenir ses désirs de communiquer la joie de l’Évangile.