Eucharistie : sainteté et sanctification

Article de mgr Flavio Capucci, publié dans les Actes du symposium "Eucharistie: Sainteté et sanctification", à Rome, en décembre 1999

1. Si le mystère eucharistique est le centre de la vie de l’Église, la foi en l’Eucharistie est, sans nul doute, le signe le plus authentique de l’identité catholique, rendu évident dans les fruits de sainteté que recueillent les chrétiens qui s’appuient sur Elle pour bâtir leur vie spirituelle personnelle. Saint Josémaria est un témoin significatif de cette centralité. Dans son message, la proclamation de la vocation universelle à la sainteté désigne les activités terrestres non seulement comme un lieu de rencontre avec le Christ, mais comme le moyen et la matière de la sanctification. Dans ce contexte théologique, le mystère de l’Incarnation est perçu dans sa radicalité et la foi en la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie a un rôle décisif aussi bien dans la sanctification personnelle que dans la rédemption du monde.

2. Pour ce qui est du premier aspect, saint Josémaria n’a pas hésité à affirmer que l’Eucharistie est « le centre et la racine de la vie spirituelle » (Quand le Christ passe, n° 87), expression que reprendra par la suite le décret Presbyterorum ordinis. Saint Josémaria a ainsi encouragé des centaines de milliers d’hommes et de femmes à témoigner de la centralité de la Messe dans la vie quotidienne. Il tenait à ce que l’on confirme le besoin, très souvent passé sous silence de nos jours, de se préparer à recevoir dignement le Seigneur, en purifiant l’âme dans le sacrement de Pénitence. Inspirés par cet amour de l’Eucharistie, presque un millier de professionnels décidèrent de se faire ordonner prêtres. Il apprit à observer de façon exemplaire les prescriptions liturgiques concernant le culte et propagea intensément la dévotion eucharistique dans le peuple de Dieu : des visites au Saint Sacrement, l’oraison mentale devant le tabernacle, des communions spirituelles, des Saluts simples ou solennels, des expositions, des veillées d’adoration nocturne…

3. Quant au second aspect, saint Josémaria devance tous les développements que la centralité de la foi eucharistique est appelée à connaître dans le cadre de la nouvelle évangélisation qui attend l’Église au troisième millénaire. Dans cette perspective, ce message de sanctification du monde ab intra, de prise de conscience des possibilités apostoliques qui découlent de la présence du laïcat dans les noyaux vitaux de la société, est d’une actualité particulière. Sous cet angle-là, la dimension de l’Eucharistie comme première force dynamique de la vie chrétienne est mise en valeur, puisque la Sainte Messe est le sacrifice du Christ qui assume en lui et divinise tout effort de l’homme. « Notre Dieu a décidé de demeurer dans le Tabernacle pour nous alimenter, pour nous fortifier, pour nous diviniser, pour rendre efficace notre tâche et notre effort. (Quand le Christ passe, n° 151) » Tout agir humain est ainsi élevée et sanctifié (cf. n° 155), nous devons penser que « si la réception du corps du Seigneur nous a renouvelés, nous devons le prouver par nos actes. Que nos pensées soient sincères: qu'elles soient des pensées de paix, de générosité, de service. Que nos paroles soient véridiques […]. Que nos actes soient cohérents, efficaces, opportuns; qu'ils aient le bonus odor Christi. ( n° 156).

4. Chaque chrétien devient alors une hostie vivante, son âme en grâce est un tabernacle vivant au cœur du monde, son travail est la matière d’un sacrifice de louange à Dieu qui, uni à celui du Corps et du Sang du Christ, transforme le monde, l’élève par l’Esprit Saint jusqu’au Père, lui procure le salut. Avec la force de l’Eucharistie, le chrétien est en mesure de mettre la Croix du Christ au sommet de toutes les activités humaines. Voici ce que saint Josémaria disait dans une méditation prêchée lors de la solennité de la Fête-Dieu : «Nous devons aussi le découvrir dans nos occupations habituelles. A côté de la procession solennelle de ce jeudi, il doit y avoir la procession silencieuse et simple de la vie courante de chaque chrétien, homme parmi les hommes, mais qui a reçu la grâce de la foi et la mission divine d'avoir à actualiser le message du Christ sur la terre. Erreurs, misères, péchés ne nous manquent pas. Mais Dieu est avec les hommes et nous devons nous disposer de telle sorte qu'Il puisse se servir de nous et que son passage parmi les créatures soit incessant.

Demandons donc au Seigneur la grâce d'être des âmes eucharistiques, de nous aider à ce que nos rapports personnels avec Lui expriment la joie, la sérénité, le désir de justice. Nous aiderons alors les autres à reconnaître le Christ, nous contribuerons à Le mettre au sommet de toutes les activités humaines. Ainsi se réalisera la promesse de Jésus: et moi, élevé de terre, j'attirerai tous les hommes à moi (cf. Jn 12, 32). (Quand le Christ passe, n° 156)