Sainte Thérèse d’Avila et saint Josémaria

Voici, en ce Vème centenaire de la naissance de sainte Thérèse d’Avila, un choix de récits et de textes qui évoquent l’attachement de saint Josémaria à cette sainte et à ses écrits.

Voici, en ce Vème centenaire de la naissance de sainte Thérèse d’Avila, un choix de récits et de textes qui évoquent l’attachement de saint Josémaria à cette sainte et à ses écrits.

Quand entre la fin décembre 1917 et le début de l’année1918, le jeune Josémaria découvrit des traces de pieds nus sur la neige, son âme fut profondément touchée. Il eut la totale assurance que le Seigneur voulait quelque chose de lui.

Il alla trouver le Père José Miguel, carme déchaussé qui avait laissé ces traces, pour qu’il l’oriente spirituellement.

Ce saint religieux compris que le Seigneur appelait Josémaria lorsqu’il perçut ses magnifiques dispositions intérieures. Il lui suggéra de devenir carme, possibilité ne l’attirait pas plus qu’elle ne le rebutait. Cependant, après avoir médité tout cela en sa prière, Josemaria comprit que ce n’était pas ce que Dieu lui demandait, compte tenu, entre autres, de sa situation familiale. Il eut alors l’intuition qu’il fallait qu’il devienne prêtre pour être plus disponible à ce que le Seigneur voulait de lui.

Ceci étant, il ne se fit plus aider par le Père José Miguel auquel il voua toujours sa sincère gratitude avec un profond attachement à l’ordre des Carmes.

Il vénérait au plus haut point Sainte Thérèse de Jésus, Saint Jean de la Croix et Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Lecteur assidu de leurs œuvres, il évoquait très souvent dans sa prédication ces grands maîtres de la spiritualité chrétienne, qu’il citait souvent en soulignant, au demeurant, que sa façon de vivre et de considérer la vie chrétienne était tout autre.

« C’est Sainte Thérèse qui a obtenu pour moi de Jésus, la Joie, avec une majuscule, dont je jouis aujourd’hui ».

Ce fut au séminaire de Saragosse, que saint Josémaria approfondit les écrits de la sainte d’Avila. Passionné de littérature, le jeune Josémaria consacrait son temps libre à la lecture. On le voyait prendre des notes, transcrire des phrases, des pensées. Il prenait du temps sur son sommeil. Les séminaristes passaient devant chez lui la nuit et voyaient filtrer sous sa porte la lueur vacillante d’une bougie car toutes les pièces du Séminaire Saint-Charles ne bénéficiaient pas de l’électricité.

C’est ainsi qu’il profita de deux ans de lecture. Par la suite, il n’eut pratiquement plus le temps ni l’occasion de se pencher sur ce type d’ouvrages profanes, excepté parfois pour consulter les classiques. Mais il lisait ainsi en profondeur les mystiques et les ascètes pour y étudier les opérations cachées de la grâce. Il appréciait très particulièrement les œuvres de Sainte Thérèse.

Les lectures des classiques du Siècle d’Or espagnol se reflétaient en ses écrits, dans sa prédication, sa vie de tous les jours, dans ses efforts pour égayer le quotidien de sa famille. En 1931, déjà jeune prêtre, à Madrid, dans une situation financière plus que précaire, il

mit un soin tout particulier à entourer les siens : “Je vais retrouver la Très Sainte Vierge chez ma mère, Sainte Thérèse ou la Petite Thérèse chez ma sœur Carmen et Jésus Adolescent, chez Guitin (diminutif affectueux de son frère Santiago).

La persécution religieuse sévissait en Espagne. Le 14 octobre, il apprit l’approbation du tristement fameux article 26 de la Constitution qui entraîna l’expulsion de la Compagnie de Jésus.

Ce soir là, il est allé trouver son confesseur à Chamartin. Le danger ne touchait pas que les Jésuites. Tous les couvents, les résidences des religieux étaient exposés aux assauts. Pour les protéger, les étudiants catholiques montaient habituellement la garde la nuit. Le 15 octobre, en la fête de Sainte-Thérèse de Jésus, Josémaria est arrivé chez les religieuses dont il était l’aumônier et qui, dans leur clôture, étaient très effrayées par les rumeurs alarmantes qui leur parvenaient. Il les rassura de son mieux, par ses propos encourageants et optimistes.

« Aujourd’hui, je suis arrivé dans la clôture de Ste Isabelle. J’ai encouragé les religieuses. Je leur ai parlé d’Amour, de Croix, de Joie… et de victoire. Fini les angoisses ! Nous sommes au début de la fin.

« C’est Sainte Thérèse qui a obtenu pour moi de Jésus, la Joie, avec une majuscule, dont je jouis aujourd’hui, alors que, humainement parlant, je devrais être triste pour l’Église et à cause de mes affaires qui vont vraiment mal. Beaucoup de foi, d’expiation, et par-dessus la foi et l’expiation, beaucoup d’Amour». De plus, ce matin, pour purifier deux Ciboires, afin de ne pas laisser le Saint Sacrement dans l’église, j’ai consommé pratiquement la moitié des hosties réservées, et donné le reste à la communion des religieuses ».

Les religieuses ont retrouvé la joie et l’en ont bien récompensé. « En quittant la clôture, à la porterie, elles m’ont montré un Enfant, beau comme le Soleil. Je n’ai jamais vu de Jésus plus beau. Ravissant, elles l’ont dévêtu : il a les bras croisés sur sa poitrine, des yeux entrouverts. Beau : je l’ai dévoré de baisers, je l’aurais bien volontiers dérobé ».

Chemin, le plus connu de ses ouvrages, a été comparé aux écrits de saint Jean de la Croix, notamment à ses « Précautions spirituelles ».

L’abbé Ibañez Langlois qui n’ignore pas le lien existant entre saint Josémaria et les classiques de la littérature spirituelle espagnole, privilégie plutôt sainte Thérèse de Jésus que saint Jean de la Croix : « C’est avec Siècle d’Or, avec sainte Thérèse, qu’il a le plus de liens de parenté. En effet, de même qu’elle s’exprime dans une prose colloquiale et percutante, loin de toute prétention d’écrivain et sans même savoir qu’elle en était un, de même Josémaria Escriva, à son insu, fait de la grande littérature en ne prenant que des notes de conscience rapides, en écrivant des lettres de famille, des réflexions personnelles tirées de sa prière.

Plusieurs points de Chemin où il la cite témoignent de l’influence de Sainte Thérèse dans la façon d’écrire du fondateur de l’Opus Dei.

Volonté. — Énergie.—Exemple.— Ce qu’il faut faire, on le fait... Sans hésiter... sans ménagements.

Autrement Cisneros n’aurait pas été Cisneros, ni Thérèse d’Ahumada, Sainte Thérèse, ni Ignace de Loyala, saint Ignace.

Dieu et audace! — Regnare Christum volumus!"

Chemin, 11

Homme libre, soumets-toi à une servitude volontaire pour que, à cause de toi, Jésus n’ait pas à reprendre ce qu’il a vraisemblablement dit à Mère Thérèse en parlant de quelqu’un d’autre: “Thérèse, moi je voulais… mais les hommes n’ont pas voulu.

Chemin, 761

Enfant audacieux écrie-toi : Quel amour que celui de Thérèse ! — Quel zèle que celui de Xavier ! — Quel homme admirable que saint Paul ! — Et bien moi, mon Jésus…, je t’aime plus que Paul, que Xavier et que Thérèse !

“ Toujours ”, est l’adverbe qui fit de sainte Thérèse de Jésus quelqu’un de grand.

Chemin, 874

Ne demande pas à Jésus pardon que pour tes fautes, ne l’aime pas seulement avec ton cœur.

Répare toutes les offenses qu’on lui a faites, qu’on lui fait et qu’on lui fera… Aime-le de toute la force de tous les cœurs de tous les hommes qui l’ont le plus aimé.

Sois audacieux : dis-lui que tu es plus de fou de lui que Marie-Madeleine, plus que Thérèse, que la petite Thérèse…, plus fou qu’Augustin, Dominique et François, plus qu’Ignace et Xavier.

Chemin, 402

Dans le livre de sa vie, sainte Thérèse d’Avila dit de saint Joseph : « Qui ne trouve pas de maître qui lui apprenne à prier, qu’il prenne ce glorieux saint pour maître et il ne s’égarera pas en chemin. » — Le conseil vient d’une âme expérimentée. Suis-le.

Chemin, 561

Une mauvaise nuit, dans une mauvaise auberge. C’est ainsi, dit-on, que Mère Thérèse de Jésus définit la vie ici-bas. La comparaison est réussie, n’est-ce pas ?

Chemin, 703

Sans hâte. — Considère ce que tu dis, qui le dit et à qui c’est dit. — Car ce parler hâtif, ne laissant aucune place à la réflexion, n’est que bruit de casseroles.

Et, avec sainte Thérèse, je te dirai que ce n’est pas prier, que de remuer abondamment les lèvres.

Chemin, 85

Et par ailleurs, dans ses autres écrits :

Je vais poursuivre ce moment de conversation devant le Seigneur avec fiche que j’utilisai il y a quelques années déjà et qui n’a pas perdu une ride. Je me servais à l’époque de cette considération de sainte Thérèse : tout est rien et moins que rien qui s’achève et ne contente pas Dieu.

En effet, dîtes-vous bien que l’âme ne goûte plus la paix et la sérénité dès qu’elle s’écarte de sa fin, quand elle oublie que Dieu l’a créée pour la sainteté.

Tâchez de ne jamais perdre ce point de mire surnaturel, y compris dans vos loisirs et dans votre repos, aussi nécessaires à votre vie que le travail.

Amis de Dieu, 10

“ Toujours ”, est l’adverbe qui fit de sainte Thérèse de Jésus quelqu’un de grand.

Tout enfant, alors qu’elle franchissait les remparts de la ville, par la porte de l’Adaja, en compagnie de son frère Rodrigue, pour aller au pays des Maures, dans l’espoir d’y être décapités pour le Christ ; elle glissait à l’oreille de son frère, qui se fatiguait: « pour toujours, pour toujours, pour toujours »24.

Les hommes mentent quand ils disent “ pour toujours» dans les affaires d’ici bas. Seul est vrai, d’une vérité absolue, le « pour toujours » face à Dieu. Et c’est ainsi que tu dois vivre, dans la foi qui te fera goûter les délices du ciel, des douceurs de miel, à la pensée de l’éternité qui est vraiment pour toujours.

Amis de Dieu, 200

L’homme de foi juge des choses d’ici-bas à leur juste valeur, il sait que tout ici n’est qu’une mauvaise nuit dans une mauvaise auberge, comme se plaît à le dire Sainte Thérèse. Il est profondément convaincu que notre existence sur terre est un temps de travail et de combat, un temps de purification pour solder la dette de nos offenses à la justice divine. Il sait aussi que les biens temporels ne sont que des moyens, dont il se sert avec générosité, avec héroïsme.

Amis de Dieu, 203

"J’aime d’un grand amour la vocation des âmes contemplatives, dit-il un jour aux Carmélites qu’il visitait. En effet, dans l’Opus Dei nous sommes contemplatifs au beau milieu de la rue ».

Voilà ce qu’en dit Sainte Thérèse :" qui ne fait pas oraison n'a pas besoin d'un démon qui le tente; alors que qui n’en fait qu’un quart d’heure par jour fait nécessairement son salut"... En effet, le dialogue avec le Seigneur — détendu, y compris dans l’âpreté ou la sécheresse de l’âme— nous fait percevoir la vie en sa juste dimension. Deviens donc une âme de prière.

Forge, 1003

Les personnes qui l’ont fréquenté rapportent aussi des événements, des propos qui témoignent de l’influence de Sainte Thérèse .

Voici ce que le bienheureux Alvaro del Portillo en disait : « Dès le début, le Père disait déjà aux premiers membres de l’Opus Dei que pour que la vie intérieure grandisse, il est bon consacrer chaque jour de la semaine à une dévotion solide : à la Très Sainte Trinité, à l’Eucharistie, à la Passion, à la Sainte Vierge, à Saint Joseph, aux Saints Anges Gardiens, aux âmes bénies du Purgatoire. Comme toujours, il tirait ce conseil de son expérience, de sa vie. Je puis vous assurer que ses dévotions principales étaient bien la Très Sainte Trinité, Dieu Un et Trine, avec les Trois Personnes divines qu’il considérait une par une, le Père, le Fils et le Saint Esprit ; Notre Seigneur Jésus-Christ, présent essentiellement en l’Eucharistie ; sa Passion et ses années de vie cachée ; la Très Sainte Vierge ; Saint Joseph ; les Saints Anges Gardiens ; les Saints et tout particulièrement les douze Apôtres, les Saints qu’il choisit comme intercesseurs dans certains aspects de l’apostolat de l’ Œuvre, Sainte Catherine de Sienne, Saint Nicolas de Bari, Saint Thomas More, Saint Pie X ainsi que le Saint Curé d’Ars et d’autres saints comme Saint Antoine l’abbé, Sainte Thérèse de Jésus, etc. ; ainsi que les premiers chrétiens ».

Mgr Xavier Echevarria évoque le rapport confiant de saint Josémaria avec Dieu son Père, en dépit de sa fatigue ou de ses difficultés: “« Je ne l’ai jamais vu découragé, dubitatif, inquiet. Près de lui, on percevait ce qu’il nous avait tant de fois évoqué en citant Sainte Thérèse de Jésus : « Qui a Dieu, ne manque de rien » Il en parlait ainsi en 1966 : « L’angoisse et la tristesse sont diamétralement opposées à l’essence même de Dieu qui est le bonheur au degré suprême. Si vous êtes fatigués, parlez-en au Seigneur, si vous vous heurtez à des difficultés importantes, mettez-les dans les mains du Seigneur. Et j’insiste, évitez que personne ne puisse se dire devant votre attitude personnelle que le joug du Maître n’est pas doux, n’est pas un fardeau d’amour ».

Saint Josémaria qui a toujours aimé l’état religieux, visitait les couvents où il était invité dès qu’il en avait l’occasion. Au Chili, en 1974, la mère prieure du couvent des Carmélites de Pedro de Valdivia, animée de l’espoir de le recevoir un jour chez elles, lui rappela dans sa lettre d’invitation qu’elle était sûre de ce qu’affirmait sainte Thérèse : « On atteint tout ce qu’on espère ». Saint Josémaria, touché par ce raisonnement, alla leur rendre visite le matin où il reçut sa lettre.

"J’aime d’un grand amour la vocation des âmes contemplatives, leur dit-il. En effet, dans l’Opus Dei nous sommes contemplatifs au beau milieu de la rue »

Nous vous comprenons parfaitement, tout comme les Mères Carmélites nous comprennent très bien elles aussi, et nous aident de leur prière. Je viens vous demander l’aumône de votre prière : priez ». L’âme de ces carmélites apprécia ses commentaires et leur palais, les chocolats qu’il leur avait offerts.

Sources

Andrés Vazquez de Prada, Le fondateur de l’Opus Dei ,T. 1

Xavier Echevarria, Entretien avec Salvador Bernal, Memorias del Beato Josemaría.

Álvaro del Portillo, Entretiens sur le fondateur de l’Opus Dei.

José Miguel Ibáñez Langlois, Josemaría Escrivá como escritor

Josémaria Escriva de Balaguer, Chemin

Josémaria Escriva de Balaguer, Forge

Josémaria Escriva de Balaguer, Amis de Dieu

www.opusdei.org